L'Abbatiale

crédits photos : David Farge, Cie Houle Douce

l'église abbatiale

L’église abbatiale est dédiée à la Sainte Trinité et de nombreux indices le rappellent. C’est ainsi que saint Augustin qui a écrit un Traité de la Sainte Trinité est mis à l’honneur deux fois. Un tableau (dans la chapelle des quatre Docteurs) le représente avec son Traité à la main, au bord de la mer. Il voit un enfant, allant et venant du rivage à la mer : cet enfant creuse dans le sable un petit trou et va chercher de l'eau avec un coquillage pour la verser à l’intérieur. Augustin lui demande : "Que fais-tu là ? L'enfant répond : je veux mettre toute l'eau de la mer dans mon trou. Mais, mon petit, ce n'est pas possible ! reprend Augustin. La mer est si grande, et ton bassin est si petit ! C'est vrai, dit l'enfant. Mais j'aurai pourtant mis toute l'eau de la mer dans mon trou avant que vous n'ayez compris le mystère de la Sainte Trinité."

Il est possible de trouver d’autres signes de cette présence de la Sainte Trinité. Comme une peinture sur un des piliers qui nous parle de la tendresse du père pour celui qui est allé au bout de Sa volonté.

C’est saint Antoine et saint Athanase, par le biais du Concile de Nicée, qui nous rapprochent de cette dédicace « à la louange et au nom de la sainte et indivisible Trinité, en l'honneur de la Bienheureuse Marie toujours vierge, et sous le patronage de saint Antoine ». Consacrée par le pape Calixte II (nommé à Cluny), l'un des Papes les plus importants et les plus marquants de la chrétienté, le 20 mars 1119.

Facade Saint Antoine l'Abbaye crédits photos : David Farge, Cie Houle Douce
Oiseau en pierre Saint antoine crédits photos : David Farge, Cie Houle Douce
l'avant de l'abbaye de Saint Antoine crédits photos : David Farge, Cie Houle Douce
Abbaye Gothique à Saint Antoine l'Abbaye en Isère crédits photos : David Farge, Cie Houle Douce

C’est une première église romane qui est consacrée en 1119. L'église actuelle de style gothique voit le jour au XIIIème siècle.

Il faut noter son caractère atypique : elle est plus large que haute (32 et 22m). Deux raisons certainement, le terrain et la nécessité d’un espace pour les pèlerins.

Le matériau est un matériau local : la molasse, un grès très tendre qui se délite et se transforme facilement en sable.

On peut suivre l’évolution du style gothique en partant du chevet, gothique primitif en passant par la nef, gothique classique et terminant par le portail occidental, gothique flamboyant.

Cette façade aurait été terminée vers 1484. Il manque le gable central, le pignon au-dessus de la grande baie. Les statues en pied manquent aussi, destructions, manque d’argent ?

facade de l'abbaye crédits photos : David Farge, Cie Houle Douce

La façade ouest est sous échafaudage de 2020 à 2023. Le tympan possède 3 belles voussures restaurées en 1972. On y trouve :

  • Isaïe : livre ouvert, enseignement pour tous, grande barbe.
  • Jérémie : manteau et phylactère, grande barbe.
  • David : barbu avec sa couronne et sa harpe.
  • Aaron : personnage plus modeste fier de sa Foi qui regarde Dieu avec ferveur. (pas de livre ni de phylactère)
  • Jean l’Evangéliste : jeune homme imberbe, montrant un phylactère de son doigt, une invite à écouter son message. (évangile et apocalypse)
  • Eli : prophète et juge, coiffe indiquant la puissance mais qui lui cache les yeux ; il est mort aveugle. Présence d'un phylactère.
  • Dieu le Père tenant le monde dans sa main, le fils portant les stigmates de la croix, l’Esprit Saint retenant son manteau soulevé par le souffle : une représentation de la Sainte Trinité.
  • Enoch : Père de Mathusalem, il vécut 365 ans, patriarche et  juge (coiffe), le seul dont on voit un pied. Celui qui marche vers Dieu.  
  • Moïse avec les tables de la Loi et des « cornes », mauvaise traduction de « rayons de lumière » ou signes de puissance.
  • La Sybille : chez les grecs elles sont prêtresses d’Apollon. Elles pratiquent la divination et la prophétie, des prophéties souvent obscures d’où l’expression « langage sibyllin ». Elles sont au nombre de 12. Christianisées on rapproche leur nombre de celui des apôtres, on en fait des prophétesses de l’annonce de la venue du Christ et du Jugement Dernier. On les retrouve dans l’iconographie chrétienne à partir du XIIème et surtout du XVème siècle avec des attributs liés à la vie du Christ et de la Vierge. Elles ont leur place aux tympans des cathédrales comme annonçant le Christ aux  « Gentils », les païens, les non chrétiens. (gentiles = peuples.)
  • Salomon : l’épée du jugement (les deux mères), ou le rouleau (la loi ou les poèmes : Odes ou Cantique des Cantiques). Constructeur, temple, Jérusalem…Souvent imberbe, jeunesse.
  • Ezéchiel : Des visions, il prêche le repentir et annonce le salut par le Messie.
  • Daniel : Dernier des prophètes à annoncer le Messie, prophète de l’Exil, de la rédemption, manteau, barbe à deux pointes, phylactère.
  • Les Séraphins : Trois paires d’ailes, autour du trône de Dieu. Isaïe 6 1,7 les décrit.
  • Les Chérubins : 2 paires d’ailes, au centre de la vision d’Ezéchiel au chapitre 10
  • Les Anges : les messagers
cherubin facade abbaye saint antoine crédits photos : David Farge, Cie Houle Douce
details facade crédits photos : David Farge, Cie Houle Douce
details saint antoine abbaye crédits photos : David Farge, Cie Houle Douce
autres détails facade crédits photos : David Farge, Cie Houle Douce

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La Chapelle de la « Bonne Mort ».

Dite aussi chapelle des fresques car elle est ornée de scènes de la vie de saint Antoine, saint Paul de Thèbes, saint Christophe, sainte Barbe et d'une magnifique crucifixion. Tout dans cette chapelle nous parle du passage. Les pélerins y sont invités à méditer sur la mort, une « bonne mort ».

Saint-Michel archange, celui qui a vaincu le Dragon la représentation du Mal.
Il est ici celui qui pèse les âmes : celle rouge, remplie de vie et celle blanche couleur de la mort déjà entrainée par le démon. Il est au Moyen-Age celui qui défend les âmes contre le démon au moment de la mort.

Saint-Christophe, un saint légendaire dont on ne sait pas grand-chose. La tradition le dit géant, fort, puissant. L'histoire de saint Christophe :

Christophe est d’abord un géant à tête de chien nommé « Réprouvé », le baptême lui donne tête humaine, il veut mettre sa puissance au service du plus fort, il essaye de se mettre au service d’un roi, mais s’aperçoit vite que ce dernier craint le Diable. Il choisit alors de se mettre au service de ce dernier, mais là encore, il découvre que Satan est effrayé par une croix au bord du chemin, il décide alors de se mettre au service du Christ, mais il ne sait comment s’y prendre. Il rencontre alors un ermite qui lui propose de se placer près d’un gué et de faire passer sur son dos les travailleurs qui le franchissent chaque jour, ce qu’il fit.

Un jour il fit passer le gué à un enfant qui, au milieu du passage, devint si lourd qu’ils risquèrent la noyade tous les deux. L’enfant se présenta alors comme le Christ portant les pêchers du monde. Pour appuyer ses dires il demande à Christophe de ficher son bâton dans le sol et celui-ci se couvre de feuilles, de fleurs et de fruits. Convaincu, il part sur les chemins pour porter la Parole de Jésus-Christ. En chemin, il est arrêté, alors le roi lui fait subir des tentations. Devant sa résistance, il décide de le tuer. Mais les flèches qu’il lance n’atteignent pas Christophe, et même plus, l’une revient vers lui et lui perce l’œil. Converti, c’est avec de la boue mélangé au sang de Saint Christophe qu’il se guérira.

Le Christ le confirma dans sa tâche de passeur, y compris des âmes au moment de la Mort. La représentation de ces deux passeurs pour l’éternité offre une vision rassurante de la mort, de la bonne mort, de celui qui a mis sa confiance dans le Christ. Et accompagnant la représentation de ces deux passeurs, une crucifixion, le sacrifice du Christ pour notre Salut. Cet événement violent, dur est ici représenté d’une façon presque paisible, pleine d’espérance.

Le Christ est mort. Pas de souffrance sur son visage ; des anges dans le ciel rouge, l’un d’eux recueille dans un calice le sang jailli de son côté. (Lien avec l’eucharistie).

Marie sa mère à ses pieds dans une attitude de méditation. Puis Jean l’évangéliste, l’oreille tendue vers un ange, écoute le message pour pouvoir écrire plus tard son évangile. En spectateur, Antoine l’Egyptien, et Géranton de Château neuf l’Abbé qui a commandé cette fresque.

Enfin, de l’autre coté de la nef, on peut apercevoir la Mort vaincu par la Vie, et le Christ sortant victorieux du tombeau.